Pas de prostituées sur le chemin des écoles

Pour l’UDC, la présence de prostituées à 500 mètres des écoles est inacceptable.

Entre d’autres termes, l’UDC veut bannir la prostitution des Pâquis.

Autant interdire la prostitution dans toutes les rues du canton…

L’expérience nous montre qu’à chaque fois, les spéculateurs immobiliers sont en embuscades.

Cette affairisme effréné aura également pour effet de déplacer et de fragiliser encore davantage ces femmes, déjà très stigmatisées, en instaurant des rénovations inadaptées aux travailleuses du sexe qui n’auront alors plus d’autres choix que de partir ou d’accepter des conditions encore plus insupportables. Pour sa part, l’Unité d’action Communautaire des Pâquis (Service de la cohésion sociale et de la solidarité de la Ville de Genève), n’a reçu aucune plainte des habitant-e-s des Pâquis concernant un cas de violence ou d’atteinte à la décence perpétré par des travailleuses du sexe à leur encontre. Il semble donc que plutôt que de population dangereuse, il s’agisse d’une population «en danger».

Nous devons veiller à ce que les lois soient fondées sur des faits et non des idéologies.

PL 10868: Prise de position d’Aspasie

Prémisses

  1. Le vrai critère d’une société humaine et bienveillante se situe dans son engagement à protéger les droits des minorités (ONUSIDA).
  2. Nous devons veiller à ce que les lois concernant la prostitution soient fondées sur une volonté de promotion des droits humains, d’accès aux services de santé et non sur des idéologies. Les travailleuses du sexe (TS) doivent être moins discriminées, il faut favoriser leur inclusion sociale.
  3. Les TS sont en situation précaire mais doivent avoir le droit de recourir aux stratégies qu’elles ont choisi pour sortir de cette précarité. Ce n’est que la prise de conscience d’une éventuelle souffrance associée au travail du sexe et le soutien psycho-social qui permettront de passer éventuellement à autre chose…
  4. Ce projet de loi est moralisateur et devrait être documenté: il n’existe pas de publication et de résultats de recherche fondé sur des faits concernant la psychologie des enfants confrontés à la problématique prostitutive. Par contre, il est reconnu dans le champ professionnel social et psychologique que:
  • Le développement physique de l’enfant n’a rien à voir avec les personnes présentes dans le champ de vision desdits enfants
  • Le développement des capacités cognitives de l’enfant est favorisé par la diversité des problèmes psychomoteurs qu’il doit résoudre (carré dans carré, rond dans rond), et plus tard par la diversité des situations psycho-sociales qu’il doit comprendre.
  • Le développement affectif des enfants se fait en réponse aux personnes qui le soignent au quotidien, en réponse à la manière dont ils sont touchés, entourés, aimés, contenus dans leurs émotions, écoutés. Ce sont les personnes proches de l’enfant et non les quidams croisés dans la rue qui structurent l’affectivité des enfants.
  • Le développement social se fait essentiellement avec la famille, les éducateurs de la petite enfance, les camarades de classes, les enseignants. Pas avec les personnes croisées dans la rue avec lesquelles l’on n’interagit pas.

 

Observation d’Aspasie

En tant qu’experte, Aspasie, aimerait partager avec les commissionnaires les éléments suivants qui lui sont rapportés dans le cadre de son travail de prévention et de soutien psycho-social aux TS

Travailler dans la rue

c’est s’affranchir des contraintes structurelles liées aux «salons»,  c’est être une « artisane », une indépendante

Moins de précarité économique car

  • loyer mensualisé, voire absence de loyer (bd helvétique)
  • pas de frais d’annonce (donc pas d’usure publicitaire)
  • pas d’usure immobilière (jusqu’à 700 CHF /semaine pour une chambre actuellement !)

Plus de santé

  • influence moins directe des pratiques des autres sur les pratiques propres
  • plus grande marge de manœuvre lors des négociations avec le client
  • plus grande capacité à refuser les demandes inadéquates en termes d’infections sexuellement transmissible

Pour les plus anciennes artisanes, qui ne trouveront pas de place dans les salons, et qui ne savent que travailler dans la rue, cette loi est un aller simple pour l’hospice général.

Le refus de protéger le TS de rue n’est donc pas seulement un manquement  à l’éthique, un refus d’inclure socialement les marges,  mais aussi une position indéfendable sur le plan de la santé publique. En effet, l’exclusion sociale augmente le sentiment de rejet et éloigne des lieux des testing et de soins.  Ce projet de loi va à l’encontre des  recommandations de non-discrimination de l’ONUSIDA.

De plus, à Zurich, où des entrepreneurs immobiliers ont été très proactifs pour interdire la prostitution de rue dans le quartier 4, on observe que de nombreux immeubles ont été achetés par les mêmes entrepreneurs : ils ont transformé du loyer locatif au mois en loyer journalier usurier pour les travailleuses du sexe. Pénaliser le travail de sexe de rue, c’est favoriser le travail du sexe en salon et l’usure immobilière. A qui profite donc ce nouveau PL?

Enfance et décence

Les adultes qui ont grandi dans les Pâquis gardent un bon souvenir de leur enfance dans ce quartier. Ils n’ont jamais été perturbés par la présence des TS, au contraire des liens d’amitié se sont parfois noués.

Le nombre d’heures passées par les adolescents devant  MTV / rouge TV où à observer des  affiches publicitaires qui montrent sans aucune pudeur des femmes et des hommes dans des tenues et des postures audacieuses dépasse largement  le temps passé à croiser des TS dans la rue aux Pâquis ? A contrario, de nombreuses TS sont soucieuses d’être sobrement habillées pour justement ne pas choquer les passants.  Nombreuses sont celles qui sont aussi mamans.  De surcroît, les enfants dans leur majorité ne passent pas par les rues où se trouve la prostitution de rue, mais plutôt par la rue du Môle ou de la Navigation… On peut donc légitiment se demander combien d’enfants le PL concerne, et si l’enfance n’est pas un simple prétexte.

Prostitution et deal de drogues

Le rapprochement entre prostitution et deal de drogues est douteux. Les TS se plaignent régulièrement, informellement à Aspasie, formellement à la police, de la présence des dealers qui les agressent et font fuir les clients. Les TS se plaignent d’ailleurs d’un délai d’intervention de la police trop long ( >40 min). A aucun moment la prostitution n’a fait l’objet d’un problème à régler dans un PV de l’UAC des Pâquis ou de la MQP, au contraire on y trouve une cohabitation en bonne harmonie avec les commerçants et la population du quartier. L’Unité d’Action communautaire  (UAC) des Pâquis dit même:

«Concernant l’UAC des Pâquis et après concertation avec mes collègues, il s’avère qu’aucun cas de violence ou d’atteinte à la décence qui aurait pu être perpétré par des travailleuses du sexe à l’encontre des habitants des Pâquis ne nous a été reporté. Les plaintes principales que nous avons enregistrées ont été celles des travailleuses elle-même : elles se plaignent notamment de l’insécurité de leur travail et du manque de protection de la police, de délais d’intervention extrêmement long de celle-ci. Il semble donc que plutôt que de population dangereuse, il s’agisse d’une population « en danger » et soumise aux violences de la rue, et donc à risque.»

Lois et règlements redondants

L’interdiction de racoler est déjà ancrée dans le règlement d’application de la LProst (art.8) suite au règlement relatif à l’exercice de la prostitution I 3 33 arrêté par Le Conseil d’Etat de la République et canton de Genève le 6.07.1994.

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